Toute une vie.. « Eh Indianna, t'es sûr que ça va? » Je hoche la tête d'une façon plutôt étrange, comme si j'allais m'écrouler par terre, et pourtant je maintiens que ça va. « Je pète la forme, ça se voit pas? Euh mec, pourquoi est-ce que t'es flou? ... » Et puis, le néant. […] « Il ne devrait pas tarder à se réveiller, vous pouvez aller le voir mais il faut le ménager. » Mes paupières sont tellement lourdes que cette fille croit que je dors encore. Je n'ai juste pas le courage d'ouvrir les yeux. Mon frère, à ce que j'ai pu entendre, rentre dans ma chambre pour venir s'asseoir près de moi. Il est inquiet, je le ressens. Il prend ma main, tremblant comme jamais. Il m'a toujours beaucoup aimé, beaucoup admiré, mais depuis un an sa passion pour moi est descendue en flèche. Lui seul sait que je ne suis qu'un drogué exhibant son corps tous les soirs devant une foule en délire, généralement composée de jolies jeunes femmes. Au début, ça ne le dérangeait pas, jusqu'à ce que ça me pose quelques problèmes. Manque d'argent, dettes, raclée du dealeur quand je ne pouvais pas payer … Il a tenté de me faire changer un bon nombre de fois mais lui ne sait pas ce qu'est être dépendant. On a un peu perdu le contact je dois dire, ça doit faire trois quatre mois que je ne l'ai pas revu, je me demande même ce qu'il vient foutre là ... Désirant savoir ce qu'il avait à dire et parce que le connaissant, il fuirait si je le voyais là, comme d'habitude. Monsieur n'a pas cessé de m'ignorer pendant tout ce temps. Tentant de calmer ses pleurs, étant de nature sensible et fragile, Iule arrive enfin à articuler correctement ; « Dawn … Pourquoi faut-il que tu fasses le con à chaque fois? Ca te détruit cette merde, les parents sont même pas au courant … Tu pourris ta vie, tu perds beaucoup d'argent, et ta santé ... » Il s'arrête de parler, environ cinq minutes et j'entends quelques sanglot. Puis, il reprend. « Je m'inquiète pour toi Dawn, tu me manques, ça fait tellement longtemps … Des mois qui paraissent des années ! Je t'en supplie, arrête de faire le con, arrête la drogue, je peux t'aider si tu veux ... » Non, tu ne peux pas m'aider frérot. J'ouvre lentement les yeux, et malgré tout le voir pleurer me fait mal au coeur. Il ne s'attendait pas à ce que je me réveille je crois, il sursaute. Ca me fait doucement sourire. Tentant de partir, fuir comme toujours la conversation, je le rattrape doucement par la main, bien que me sentant encore faible, j'arrive à le convaincre par un simple regard de rester un peu. Gardant ma main dans la sienne, je m'aide de celle-ci pour me redresser un peu, difficilement, toujours un peu sonné. « Merci d'être venu Iule … Je sais que ce n'est pas simple pour toi. Mais tu sais très bien ce que j'en pense … Je ne peux pas … Je t'aime et tu me manques bien évidemment, je suis navré ... » Il est rare que mon vocabulaire soit aussi correct, mais je suis fatigué, peut-être un peu trop. Je lui fais un triste sourire, pour accentuer mes excuses. Ma réponse n'a pas l'air de lui plaire, il lâche ma main brutalement et part en courant. Iule … Je me redresse sur le coup comme si j'allais réussir à le rattraper, alors que ce n'est pas le cas, en bien trop mauvais état. « Iule reviens, sil te plait! » N'ai-je fait que murmurer dans un soupire, mais c'était trop tard. Puis je ferme les yeux, le sommeil me gagnant de nouveau. Ah l'hôpital, une vielle histoire d'amour lui & moi. Mes parents ont cru et croient toujours que j'ai un problème, parce que je fais souvent des malaises, ils s'inquiètent. En réalité, c'est une trop forte dose de drogue et d'alcool mélangés qui m'envoie ici à chaque fois. Ils ne le savent pas encore, mais ça ne tardera probablement pas, il paraît que les médecins ne savent plus garder un secret. Enfin, aucun regret. Ou, peut-être … Elle n'est pas venue, à mon plus grand désespoir. Elle, c'est Rebecca, cette magnifique brune qui me fait tant d'effet, sauf que je ne lui ai encore jamais dit. Et ce n'est probablement pas demain la veille, comme on dit. J'aurais pensé qu'elle viendrait me voir à mon réveil, on s'entend vraiment bien nous deux, même plus que ce que j'aurais pensé. Je l'aime en fait. Désirant en avoir le coeur net, j'appelle une infirmière, elle s'approche de moi, je lui fais un sourire sonnant faux. « Excusez moi mademoiselle, mais pourrais-je savoir si à part le jeune homme que vous venez de voir partir, quelqu'un d'autre est venu me voir? » Elle secoue la tête négativement, fuck. Déçu, mais j'aurais dû m'y attendre. J'avais pourtant espéré … Ah, Rebecca … Je n'ai pas le temps de me remettre de ce '' choc '' si je puis dire, que voilà mes parents. Oh non, pas eux … Désormais, ils n'ignoraient plus mon penchant pour la drogue, ça n'allait pas être joyeux, c'est moi qui vous le dit. Je soupire en les voyant passer le seuil de la porte, bien qu'ils n'aient pas encore prononcé un mot, j'allais vite être agacé. […] Comme prévu, un sermon peu intéressant sur les méfaits de la drogue et de l'alcool. C'est là que je me dis que s'ils connaissaient mon métier, ils seraient verts. Mais je ne m'en fais pas plus que ça, dans peu longtemps je ne serai plus ici, enfin, j'espère.
* Huit ans auparavant – Dawn a donc onze ans – ; « Dawn, Iule, descendez sil vous plait! » Je soupire et quitte mon lit avec regret, sortant de ma chambre en claquant la porte. Il est tard, je sens que je vais encore me faire engueuler, pourtant je n'ai rien fait, pour une fois. Je descends suivit de mon petit frère, rejoignant nos parents dans le hall d'entrée. « Euhm bonjour ... » Dis-je plutôt timidement à la petite fille qui se tient derrière mon père et que je ne connais absolument pas. Mon père nous présente la jeune fille pendant quelques minutes, il lui en faut au moins une quinzaine pour trouver les bons mots, nous, on écoute avec des yeux ronds. L'histoire de la petite fille, Rebecca je crois, ressemble à un film que je n'aime pas vraiment … Ouais, le parrain. C'est vraiment bizarre. C'est la dernière phrase de mon père qui me marqua le plus, je crois ; « Rebecca va habiter avec nous, il faut que vous la considériez comme vôtre cousine. » Okay, pourquoi pas. Sur le coup mon frère et moi on ne dit rien, mais ne serait-ce que dix minutes plus tard, on va voir la dite Rebecca pour lui poser des tonnes de questions. C'est qu'on s'intéresse, nous. « Ton père c'était un vrai mafieux ? Genre le parrain ? » Et ma mère nous prit de la laisser tranquille. Elle parle pas la langue, enfin, pas beaucoup. Du coup, elle nous comprends pas trop je crois.
Trois ans auparavant – Dawn a donc seize ans – ; « Alors, que penses-tu de la Belgique? Bruxelles, c'est sympathique non? » Elle parle mieux le français depuis qu'elle est chez nous, et on passe pratiquement tout notre temps ensemble. Rebecca a deux ans de moins que moi, quatorze donc. Je la trouve de plus en plus jolie je dois dire, magnifique même, et je sais qu'avec le temps ce sera de mieux en mieux. On marche dans les rues de Bruxelles, ma ville natale, depuis déjà une vingtaine de minutes, à parler de tout et de rien, enfin, comme on peut. Déjà cinq ans qu'elle est chez nous, le temps passe si vite quand on aime … Oh, j'ai dû oublié de le mentionner, mais oui ; je suis amoureux d'elle. On se balade, et j'ai très envie de lui prendre la main mais je n'ose pas, comme je n'ai jamais osé lui dire encore ce que je ressentais. Toutes les nuits cette fille me hante, je ne peux que penser à elle, c'est même pire que la drogue, une journée sans la voir et j'ai l'impression que tout va mal. Je tente donc une approche subtile. « Tu sais, je suis vraiment content que tu sois venue chez nous, tu es une fille vraiment sympathique, on s'entend bien tous les deux. Je ne sais vraiment pas ce que je ferai sans toi aujourd'hui! » Enfin bref. *
Quelques jours après sa sortie de l'hôpital ; Je jette mes affaires avec colère dans le sac qui se remplit peu à peu. Pourquoi tant d'énervement? Iule, mes parents, tout. Il m'en veut, ne veut plus me parler depuis qu'il est venu me voir à l'hôpital et ça me stresse. Je sais que ça passera, et pourtant je préfère de loin une solution radicale à la discussion. Ca a toujours été comme ça, je suis lâche quand il faut parler de ce qu'on a sur le coeur. Mes parents n'arrêtent pas de m'en faire baver depuis qu'ils sont au courant que je me drogue, j'ai dix-neuf ans et ils surveillent tous mes faits & gestes comme si j'étais un gamin de dix ans, insupportable, je n'en peux plus. Et puis, s'il n'y avait pas Rebecca, je serais en manque. Quelques vêtements, des photos me semblant importantes – certaines avec Rebecca, d'autres avec Iule mais aucune de mes parents – et le sac était bouclé. De toute façon, je ne pouvais pas emporter grand chose, et puis je n'ai pas non plus besoin de trucs superflus. Ca prend de la place pour rien, c'est encombrant, un peu comme mes parents en fait. Alors que je ferme mon sac, Rebecca frappe à la porte déjà ouverte, je m'arrête et la regarde en soupirant. « Qu'est-ce que tu fais? » « Selon toi, qu'est-ce que je fais? Je me barre, je ne peux pas rester ici, ils me gonflent tous les trois. Je n'ai plus de vie, je ne peux plus sortir ni voir mes amis! Plus loin j'irai, et mieux j'me porterai. Tu vas me manquer Rebecca. » Elle tenta pendant quelques minutes de me raisonner mais rien à faire, je suis décidé à partir, alors je partirai. J'ai toujours été très têtu après tout, et depuis le temps qu'on se connait, elle devrait être au courant. Alors que je continue à tenter de fermer ce foutu sac – le stresse que mes parents ne rentrent avant que je m'en aille probablement – Rebecca rentre dans ma chambre. « Laisse moi venir avec toi. » Je me retourne et laisse mes affaires, la regardant dans les yeux. Gâcher sa vie à elle? Ah non, jamais. Déjà que par ma faute elle est au moins aussi droguée que moi, je ne peux pas … Alors, je secoue la tête. « Je suis navré mais je ne peux pas accepter, tu vas beaucoup me manquer oui, et sans toi ce sera difficile mais je ne peux pas faire autrement, ta vie est ici désormais … » Je crois que je n'ai jamais eu à dire quelque chose d'aussi difficile, j'ai limite envie de me foutre des baffes pour ravaler mes paroles. Je veux qu'elle vienne, dans un sens, mais ce serait affreux pour la jeune femme. Je l'aime, mais si ce n'était pas réciproque … Alors je soupire, puis m'avance vers elle. Et je crois que c'est la première fois que je viens la prendre dans mes bras, les larmes aux yeux. « Bon, c'est d'accord, tu peux venir avec moi … Seulement si tu es sûre que c'est ce que tu désires, pas avant. »
Quelque part dans les rues de Bradenton « File moi ton fric, ça fait déjà deux mois que tu dois payer Kain! Grouille toi, j'ai pas toute la nuit. » Je fouille mes poches et sors ce que je trouve ; c'est-à-dire vingt balles … Mais ce ne sera jamais suffisent, il va encore gueuler le mec … je soupire et hausse les épaules pour lui dire que ce ne sera pas encore pour ce soir, sa réponse est immédiate et je saigne de la lèvre avec son coup de poing bien placé. Ah, je crois qu'il ne veut plus attendre! Et pourtant, il devra. « Désolé beau gosse mais je peux pas te donner plus. Tu crois quoi, je bosse moi, je peux pas tout te régler en une seule fois! Evite le visage la prochaine fois ... » Dis-je d'un air un peu con en passant une main sur ma lèvre. Je l'ai toujours énervé avec mon attitude gamin. Lui faisant ensuite un beau sourire, comme je sais si bien les faire, il finit par me donner un délai supplémentaire. Un mois, sinon c'est mort. Okay okay, je ferai comme je peux, heures supp' au pire. C'est pas comme si je n'aimais pas mon travail après tout. « Calme toi c'est bon, tu les auras le mois prochain sans faute, c'est une promesse que je te fais! » « Ouais, encore une ... »
| Un joli caractère... « Mon frère c'est le meilleur. Enfin, il l'a été, y'a un temps. J'ai toujours été très admiratif de ses moindres faits et gestes, mais il y a bien longtemps que ce n'est plus le cas. Avant il était sympathique, peut-être un peu gamin mais c'était marrant et on s'amusait bien. Puis, il y a eu cette fille, Rebecca, et il a commencé à changer. Dawn a commencé à s'intéresser au plaisir des filles, à se droguer … Et depuis il m'accorde peu d'attention, je l'énerve, d'ailleurs sa patience est bien réduite. Il part au quart de tour à chaque fois et s'énerve assez facilement, bon, il est toujours aussi gamin ceci dit. Je lui en veut beaucoup d'être devenu ce mec accroc qui n'accorde plus que d'importance à sa drogue, à cette fille et à son boulot de merde. Il a toujours été très extraverti, et hyperactif, son choix ne m'étonne même pas. » Iule ; petit frère de Dawn. « Dawn est un enfant dynamique qui a toujours de l'énergie à revendre, du matin au soir. Toujours dans la lune, il n'est pas très attentif quand on lui parle, enfin sauf quand ça l'intéresse, mais c'est rare. Enfin, il n'était peut-être pas le meilleur en cours mais plutôt agréable en général, toujours souriant, etc … Ca doit faire bien quatre ans que je ne l'ai pas revu. » Un ancien professeur. « Dawn … Il est très têtu quand il s'y met, et très chiant en même temps. Toujours à vouloir avoir raison, il ne lâche jamais l'affaire même s'il sait qu'il a tord. Il n'aime pas beaucoup de choses, qu'on l'appelle autrement que par son prénom par exemple, ou qu'on touche à ses cheveux, il doit être un peu arrogant sur les bords. Mais bon, il n'est pas méchant au fond, bien que bagarreur, il est toujours là pour aider ses amis, et c'est une bonne qualité. Peut-être un peu trop jaloux, mais on l'aime comme ça. » Un ancien ami. Eh oui, vous l'aurez compris, je ne suis pas spécialement fréquentable si tu ne veux pas te prendre la tête. Chieur, têtu, très gamin, mais souriant. Un principe même, d'avoir toujours un sourire sur les lèvres, enfin, sauf quand c'est vraiment trop compliqué. Je suis très jaloux, et je n'hésite pas à frapper quand c'est de mon honneur qu'on remet en cause, je suis comme ça. En effet vaniteux, prétentieux, mais je le vis plutôt bien et puis si vous ne m'aimez pas, je vous EMMERDE. |